UNDER/STANDING – Entre deux mondes

C’est d’abord avec cette vieille carte postale de Huntington Beach semblant datée des 50’ qu’on pénètre ce Outland, Forever, I Am. Une pochette qui résumé à elle seule la dualité qui traverse ces 9 titres :  celle d’un monde baigné de lumière mais rongé par sa noirceur.
Au premier plan, on aperçoit la mer, ces vacanciers et ce ciel bleu qui promettent l’évasion ; mais au loin, les puits de pétrole dressent leurs sombres silhouettes mécaniques. Très rapidement, le décor idyllique se fissure pour révéler ce qui se cache sous la surface :  la mémoire, l’usure, la solitude.

Comme chez David Lynch, la musique de cet héritier d’un passé post rock et du collectif sleepcore Aïra navigue dans cet entre-deux où le rêve et le réel se contaminent. Outland, Forever, I Am partage avec Lost Highway ou Mulholland Drive cette tension hypnotique entre beauté et malaise, clarté et menace sous-jacente. Les voix y surgissent comme des spectres familiers, les arpèges électriques s’étirent, tout semble à la fois proche et irréel.

Dès Less For The Body, on a l’impression de l’accompagner dans ses visions, sorte de face à face avec soi-même où isolement, temps et rédemption se heurtent sans cesse.

Au cœur de ce récit, entre prophétie et confession, Toulouse 90, chanté / parlé par anthropologue Slimane Touhami, (certainement l’homme sage croisé dans I saw his face) sonne comme un réveil. Son texte, dense et incarné, dessine une ville de jeunesse et de désillusion dans laquelle résonne les thèmes de l’identité et du souvenir.  « Une ville en rose et noir, posée entre deux eaux, entre étau et laminoir, cocon et repoussoir, à la croisée des destins. »

Le voyage s’achève sur In Front of Everyone, “The same mirror in front of everyone” comme une dernière image, cette toupie qui s’arrête enfin et nous laisse devant le reflet du monde dans sa beauté, sa peur et sa disparition. En refermant Outland, Forever, I Am, on comprend qu4UNDER/STANDING porte bien son nom et que ce disque n’est pas seulement une traversée sonore, mais une tentative de descendre sous la surface pour mieux (se) comprendre.

Cassette disponible sur le label obscur BLWBCK

En live le 20 novembre au Dada, le 29 novembre au Café des 4 Chemins pour le Festival Culture Bar-Bars et le 1er décembre au dada.

Attaché de presse musical de métier, Julien est la plus belle plume d’Opus. Un éclectisme aussi riche que sa culture musicale !